LA DÉCARBONATION INDUSTRIELLE POUR REBÂTIR NOTRE COMPÉTITIVITÉ ET RÉAFFIRMER NOS ENGAGEMENTS ENVIRONNEMENTAUX
À l’ère où la crise écologique s’aggrave considérablement à cause des émissions de carbone, que ce soit à l’échelle du pays, des entreprises ou des citoyens, la solution se résume en un mot : la décarbonation. La transition vers une économie verte, efficace en termes d’exploitation des ressources et entraînant peu d’émissions de GES est impérative pour réduire le risque des changements climatiques actuels. Dans sa dynamique de lutte contre le changement climatique, le Maroc place la décarbonation de l’économie nationale au centre de ses préoccupations. Quoique le processus soit assez long, complexe et coûteux, la volonté de saisir les opportunités offertes par la tendance globale de décarbonation est plus forte. C’est un défi de taille qui nécessite des investissements importants, des technologies à la hauteur et des politiques appropriées incitant la modernisation des divers secteurs économiques concernés. Toutefois, les acteurs publics comme privés doivent massivement investir dans le développement urgent d’une infrastructure résiliente et sobre en carbone. Conscient de l’impact du changement climatique sur l’économie, le Maroc fait face, pour sa part, à un certain nombre de défis pour répondre aux enjeux de la réduction de son empreinte carbone. En effet, un processus d’élaboration d’une « Stratégie de Développement Bas Carbone à l’horizon 2050 » a été lancé, début 2020. Le but est d’établir les principales orientations de l’économie et de la société marocaines entre 2020 et 2050. Cette nouvelle stratégie envisage des transformations économiques et sociales profondes dans un monde neutre en carbone et vise à initier des réflexions menant au développement de nouvelles chaînes de valeur vertes, à faire progresser la compétitivité de l’économie du pays, tout en garantissant sa décarbonation et son positionnement proactif à l’export. Dans ce cadre, la décarbonation industrielle constitue l’un des leviers importants du nouveau modèle de développement. Elle permettra au Maroc d’améliorer sa compétitivité à l’export, d’autant plus que le pays dispose d’un avantage comparatif aux autres pays à potentiel similaire en raison des ressources renouvelables, du solaire, de l’éolien et des énergies marines. L’hydrogène vert sera, à son tour, un facteur clé de la décarbonation des économies. Pour produire cette ressource renouvelable, l’énergie éolienne pourrait être transformée en gaz propre utilisé à un stade ultérieur. En termes de coût, la combinaison de l’énergie solaire et de l’énergie éolienne assure un prix très compétitif. Produit au Maroc à partir du soleil, du vent et de l’eau, l’hydrogène vert pourrait être utilisé pour produire de l’ammoniac vert, stabiliser le réseau électrique avec l’atteinte de parts élevées d’énergie renouvelable et exporter le surplus d’hydrogène vers l’Europe. L’hydrogène vert est essentiel pour que la production d’ammoniac soit plus écologique, mais aussi pour soutenir les secteurs difficiles à électrifier tels que la production d’acier, de ciment et les transports de longue distance. L’hydrogène vert est pour le moment plus cher que la production conventionnelle d’hydrogène issue de combustibles fossiles (hydrogène gris). En combinant la réduction du coût de l’électrolyseur et de l’énergie renouvelable moins chère, le coût de l’hydrogène vert diminue. Il peut dès lors rivaliser avec l’hydrogène bleu dont les émissions de CO2 sont captées lors du processus de fabrication. La filière hydrogène est une composante stratégique de l’écosystème énergétique vert que le Maroc est en train de promouvoir. Dans ce sens, le ministère marocain de la Transition Énergétique et du Développement Durable prévoit un nouveau cadre institutionnel permettant une ouverture à la concurrence pour la production d’une énergie verte compétitive et une incitation pour la production décentralisée qui donnera accès à une électricité bas-carbone pour les industriels. Le projet de loi 40.19 modifiant et complétant la loi n°13-09 relative aux énergies renouvelables facilitera l’accès aux opportunités d’investissement et accélérera l’émergence d’un écosystème national vert.
Pour la première fois, les entreprises auront le droit de disposer d’un certificat vert justifiant que l’énergie utilisée est de source renouvelable. Les industriels pourront ainsi choisir entre des solutions de production décentralisée individuelles ou collectives. L’objectif est de réduire le coût du kWh d’électricité au maximum et d’optimiser les investissements. À terme, toutes les zones industrielles seront dotées de l’énergie électrique propre et compétitive. Pour alimenter la zone de Kénitra, un premier projet d’une capacité de 40 Mégawatt est en cours de développement. D’autres projets sont en cours d’instruction pour alimenter des zones industrielles à Tanger et à Casablanca. La mise en œuvre de mesures d’efficacité énergétique permettra également d’améliorer la compétitivité des exportations marocaines, notamment vers l’Europe. Grâce à toutes ces mesures, le Maroc démontre qu’il ne veut pas attendre l’application de la taxe carbone aux frontières de l’Union européenne pour la mise en place d’un modèle économique durable et propre. À titre de rappel, à partir de 2023, l’Europe mettra en place son mécanisme d’ajustement carbone aux frontières. L’objectif de l’UE est d’orienter les citoyens européens vers des produits éco-friendly tout en créant une équité entre les entreprises étrangères (dispensées jusque-là de la taxe carbone) et européennes (soumises à cette taxe depuis 2014). Une période de transition entre 2023 et 2025 est prévue sans obligation de paiement d’ajustement financier. À partir de 2026, la taxe carbone sera appliquée dans un premier temps sur 6 secteurs d’activité : ciment, fer, acier, aluminium, engrais et électricité avant d’être étendue à d’autres produits et services. Selon les estimations des professionnels, 65% des exportations marocaines pourraient être impactés par la taxe carbone. Pour combiner compétitivité et engagements environnementaux, le Maroc doit faire face à des défis réglementaires et économiques pour gagner le pari de la décarbonation industrielle.
"La décarbonation industrielle est une priorité pour atteindre nos objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre et pour garantir la compétitivité de notre économie. Nous devons investir dans de nouvelles technologies et des processus de production plus durables pour renforcer la résilience de notre industrie et répondre aux défis environnementaux"
"La décarbonation industrielle est un enjeu clé pour la transition énergétique et le développement durable de notre pays. Elle requiert une forte mobilisation des acteurs publics et privés pour mettre en œuvre des politiques et des stratégies ambitieuses, créer des partenariats efficaces et accélérer l'adoption des technologies propres"
ACTION AREAS
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Les investissements écologiques pour demain doivent être faits aujourd'hui
Défis de l'empreinte carbone pour l'économie marocaine et stratégies pour la décarbonation, incluant des mesures financières et non financières
Un verdissement significatif de l'industrie marocaine est essentiel pour répondre aux défis environnementaux
Accompagner les industriels dans leur transition vers des systèmes bas-carbone, y compris la production locale d'électricité renouvelable
Promouvoir l'efficacité énergétique, l'adoption de l'économie circulaire et l'innovation numérique pour une décarbonation industrielle réussie
Les stratégies Hydrogène agressives de la Chine et de la Russie pour se positionner sur le marché mondial de la décarbonation
Comment le Maroc peut tirer parti de ses atouts propres, en valorisant son émergence industrielle versus ses capacités d’exportation, dans ce jeu naissant du marché mondial de l’Hydrogène qui est en train de se dessiner ?
Quels enjeux écologiques, économiques et sociaux auxquels le Maroc doit-il répondre ? Avec quelles réformes politiques, institutionnelles, réglementaires et financières pour assurer une transition vers une "Green Economy" d'ici à 2030 ?